Dans la complainte longue comme une soirée d'hiver un jour sans pain et pluvieux depuis le matin, cette complainte donc des avatars bureaucratiques cocasses s'ils n'étaient pitoyables nous avait épargnés depuis un moment. Dernier en date depuis lundi matin une entreprise de services de haut niveau a bloqué tout usage d'Internet à son petit millier de salariés au siège sous prétexte d'usages peu compatibles avec leurs responsabilités.
On connaît tous la chanson : qui n'a jamais eu en face de lui un client ou un patron pestant et fulminant contre le laxisme de ses troupes, se retenant de tout verrouiller, tout contrôler pour ouf... finir par se calmer, jusqu'à la prochaine crise. Dans cette entreprise, pareil. Sauf que là, le responsable informatique a été sommé de mettre cela en place sans autre forme de procès. Et on verrait bien ce qu'on verra bien.
Passée la stupeur de tout quidam planté devant son PC avec un navigateur désespéremment vide, la colère a vite pris place et le pauvre responsable informatique de se trouver assailli de téléphones hurlants, de pénitents à genoux implorant sa clémence ou tentant de monnayer une contre-partie plus ou moins avouable. Dommage, le grand saint patron n'était pas là pour calculer le temps passé/perdu à essayer de récupérer l'un ou l'autre degré de liberté. Pas là non plus pour mesurer l'effet dévastateur de la mesure sur le moral de ses troupes : confiance, motivation, intégrité et j'en passe, s'ils avaient été mesurés à chaud les indicateurs en question auraient viré au rouge vif. Sirènes hurlantes.
Va-t-on passer du temps à une lecture psychanalytique de cette contre-performance managériale absolue ? Puisque vous êtes mes chers lecteurs, vous n'en avez pas besoin, votre intelligence y a déjà remédié. Mais par contre, devant ce besoin profond, brûlant et pressant et si cela avait été votre cas, quelle réponse plus créative et aux effets collatéraux mesurés aurait-on pu faire à ce grand patron ?
Pour ma part, j'ai déjà vécu la mise en place de la Charte d'utilisation de l'Internet, qui est une réponse faible et vaseuse au problème. Certes, chaque salarié la signe mais après ? On imagine une procédure fliquante par un implacable service d'audit informatique qui sanctionne et met à pied. Ca fera long feu avant le premier contrevenant pris sur le fait et brûlé virtuellement (ah ben non justement, pas virtuellement) en pleine cantine (pardon restaurant d'entreprise).
Un truc vécu, flippant, mais qui avait bien marché (à partir du moment où le dirigeant avait compris l'intérêt supérieur de faire confiance à ses troupes) fut la liste des URL visitées dont on pouvait questionner l'intérêt strictement professionnel. Mise à jour quotidiennement et publiée in extenso sur la home page de l'intranet du groupe (dans les assurances), elle fut longue au début mais a vite fondu quelques jours après la première publication. Surtout que le mail qui avait annoncé à tous sa publication comportait également explicitement la possibilité technique -mais non utilisée- de savoir quel PC consultait quelle URL... radical.
Une version très quanti-chiffrée, dans une boite gérée au centime (de franc !) près, avait consisté à mesurer le volume disque et donc le coût en serveur et bande passante supplémentaire et autres coûts induits, le tout pour arriver à une somme rondelette et responsabilisante eu égard aux objectifs stratégiques ambitieux et dévoreurs de cash.
Une autre version plus drôle, que l'on m'a narrée comme venant d'une entreprise de VPC, se concrétisa par un gigantesque cactus (type Arizona, grand désert) planté dans son pot en plein milieu de l'élégant, majestueux et volumineux hall d'accueil. Sur chaque épine, une URL suspecte. C'est vite devenu la bonne blague du jour "fais gaffe ou tu finis sur le cactus".
Chers amis, ce triste événement bien réel nous montre que la connerie n'a hélas pas encore trouvé ses limites. Il est bien dommage que trop souvent nos molécules reptiliennes nous privent d'utiliser des connexions neuronales uniformément présentes -et disponibles- pour peu qu'on les sollicite. Allez, dans un mouvement de grande générosité philanthropique, lançons le "béta-thon" pour sauver tous les pauvres petits Willy bétassons de la planète managériale. Donnez vos idées de meilleures réponses à ce vrai problème d'usages Internet hum-hum dans vos commentaires.
Intéressant article mais qui reflète malheureusement bien quelque chose qui est dans l'air du temps à en juger d'après les gesticulations d'un candidat à la présidence qui veut fliquer la société (enfin la France d'en bas parce qu'en haut on s'auto-régule n'est-ce pas !!) .. Pas étonnant que les entreprises aient le même réflexe ... Notamment les DRH qui ont oublié depuis longtemps dans leur titre le "H" ! Pas celui qu'on fume mais celui qui fait avancer et performer une boîte au lieu de brider et saquer comme à l'armée ou certaines écoles ... Pauvre de nous !!!
Rédigé par : Olivier | 22 novembre 2006 à 12:02